Le triomphe d’Alexandre, Charles Le Brun, 1661–1665

 

Œuvre baroque

Me revoilà !! Après une longue absence due à la reprise des cours, je suis enfin de retour avec un super tableau. J'ai prévu plusieurs sorties qui auront lieu en octobre. Hâte de vous les partager ^^ Sur ce, bonne lecture !

Biographie de Le Brun : (1619-1690)

Charles Le Brun, né le 24 février 1619 à Paris, mort le 12 février 1690, est un artiste-
peintre et décorateur français, premier peintre du roi Louis XIV, directeur de l'Académie royale de peinture et de sculpture, et de la Manufacture royale des Gobelins. Il s'est surtout illustré dans la décoration du château de Versailles et notamment de la galerie des Glaces. Il est le fils du sculpteur Nicolas Le Brun qui travailla à l’hôtel particulier du Chancelier Pierre Séguier (1588-1672).

L’œuvre :

Le cadre urbain n’est autre que celui de la mythique Babylone, identifiée grâce aux célèbres jardins suspendus à droite de l’œuvre, ainsi que par la statue de la reine Sémiramis, fondatrice légendaire de la grande cité mésopotamienne. Partout s’élèvent les volutes fumantes des parfums sacrés, cependant que les trompettes de la tête du cortège inscrivent la scène dans la durée musicale. Avec un effet de matière, la lumière du char d’Alexandre, tiré par deux éléphants, contraste brutalement avec les sombres opacités des pierres de la cité, rappelant qu’à Babylone les murs étaient enduits de bitume.

Debout sur son char orné qui rappelle sa victoire sur les armées de Darius, Alexandre indifférent au fracas environnant, tourne le visage de côté comme s’il prenait à témoin le spectateur de son triomphe. Le héros brandit le sceptre orné d’une statuette de la déesse de la victoire, symbole de sa nouvelle souveraineté.

Alexandre est le modèle de Louis XIV au même titre que le dieu Apollon. Le Brun utilise Alexandre pour faire la propagande de son propre souverain. Au même titre que les opéra-ballet à sujets antiquisants d’un Lully, les grandes compositions de Le Brun chantent, non sans emphase, la gloire du roi de France tout en s’appuyant sur une solide documentation historique, littéraire et archéologique pour la mise en place des personnages et le réalisme du décor. Le peintre propose une vision équilibrée de cette scène agitée, sans jamais céder à l’ivresse baroque qui s’est emparée du reste de l’Europe.  

Alexandre le Grand :

J’ai essayé de raccourcir la biographie d’Alexandre le Grand comme je pouvais. En effet, comme vous vous le doutez, il faudrait des pages et des pages…  Sa vie a été extraordinaire, faisant de lui un mythe de l’Antiquité. Couronné roi à 20 ans, victorieux de nombreux combats, il a conquis un immense empire allant de la Grèce à l’Inde. Par ses succès militaires, il a aussi contribué au développement de la culture grecque en dehors de ses frontières. Alexandre le Grand est né le 21 juillet 356 av. J.-C. à Pella, en Grèce (Macédoine). Accédant au trône en 336 av. J.-C. Le roi de Macédoine est mort le 13 juin 323 av. J.-C. à Babylone, en Mésopotamie (Irak).

 

Source littéraire :

Lebrun s’est inspiré du récit de Quinte-Curce (histoire d’Alexandre) : « Gardien de la citadelle et des trésors de Darius, Bagophanès avait fait joncher toute la route de fleurs et de couronnes et dresser de chaque côté des autels d’argent, où fumaient avec l’encens mille autres parfums. A sa suite étaient de riches présents : troupeaux de bétail et de chevaux, lions et léopard enfermés dans des cages. […] Entouré de ses gardes, le roi entra dans la ville monté sur un char, et se rendit lui-même au palais ».

Mais avant de continuer, tu te demandes peut-être qui est Quinte-Curce. J

Quinte-Curce est un historien romain qui a vécu au Ier siècle après JC. On ne sait peu de choses sur lui. On émet juste l’hypothèse qu’il ait vécue sous le règne de l’empereur Claude. Son œuvre l’a plus connu est « L’histoire d’Alexandre Le Grand »

 

Zoom :

1. Alexandre


Tout bardé d’or et de lumière, protégé par un casque au panache oscillant, Alexandre tient fermement, de sa main droite, le sceptre surmonté d’une Victoire qui atteste son statut de souverain ayant triomphé par la force des armes, mais aussi de prophète d’une ère nouvelle. Détenteur absolu du pouvoir temporel, il revendique dans le même temps une autorité spirituelle légitimée par la faveur dont il jouit auprès des dieux.

2.       L’éphèbe ambigu


Masquant le cornac qui dirige l’éléphant sur la tête duquel il est crânement juché, l’éphèbe hermaphrodite à la blonde chevelure, au vêtement bleu clair et au visage angélique se signale par l’étrangeté de son attitude. Brandissant l’encensoir de sa main gauche, tenant une longue verge de l’autre, il semble offrir à Alexandre cette bénédiction épiscopale qui était le fait de l’évêque de Reims le jour de sacre des rois de France. Le Brun tisse un lien subtil entre la légende épique du grand conquérant macédonien et la chronique contemporaine du souverain versaillais.

3. Le cavalier à la cape rouge

Si l’on se réfère aux sources antiques, et plus particulièrement à  L’Histoire d’Alexandre  de Quinte-Curce, le cavalier du premier plan serait Bagophanès, gardien de la cité de Babylone et du trésor de Darius, monarque déchu. De son bras tendu, il désigne le cratère d’or ciselé, pièce maîtresse du trésor de son ancien maitre qu’il s’apprête à offrir à Alexandre. C’est en sollicitant les trois couleurs primaires (rouge, jaune et bleu) que les trois principales silhouettes s’unissent dans une dynamique conflictuelle.

4.       Sémiramis

Figée pour l’éternité dans sa vêture de pierre, la légendaire reine Sémiraris apparaît, à l’extrémité gauche du tableau comme une jeune femme à l’allure magnifique, à la silhouette élégante, bien loin de la vision passionnée et bariolée qu’en proposeront les artistes romantiques au temps de l’exotisme antiquisant. Les versions littéraires lui donnent les traits d’une souveraine despotique et lubrique, ici Le Brun lui donne une certaine majesté.

5.    Le cratère et le trépied


Porté sur un brancard par deux serviteurs à la musculature impressionnante, le vase décoré de serpents se détache de la zone lumineuse du char royal. Chef-d’œuvre d’orfèvrerie et symbole d’universalité cosmique, il fait subrepticement écho au trépied fumant du coin inférieur droit, attribut essentiel du sanctuaire prophétique de Delphes, mais aussi renvoi sybillin au grand mystère chrétien de la Trinité.

6.       Les jardins suspendus

Au fond à droite, les illustres jardins suspendus de Babylone évoquent le paradis perdu des chrétiens, autres marque discrète du catholicisme de Le Brun. On admet généralement que Nabuchodonosor et non Sémiramis les aurait fait aménager en l’honneur de son épouse Amytis, fille d’Astyage, roi des Mèdes, pour lui rappeler les montagnes boisées de son enfance. Composé de terrasses superposées, l’ensemble aurait constitué un vaste théâtre de verdure, irrigué par l’Euphrate et regroupant l’essentiel de la flore mésopotamienne et médique. Plantés sur la terrasse sommitale, les arbres les plus hauts donnaient de loin, toujours selon Quinte-Curce, « l’impression de forêts sur la crête de leurs montagnes.


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